Da - L'odeur du café

Tit depa/Titre original 

L’odeur du café

Premye parèt/Première parution

1991 (Édition VLB)

Otè liv la/Auteur

Dani Laferyè/Dany Laferrière

1953 (Ayiti/Haïti)

Akademi franse/Académie française (2013)

Tradiksyon kreyòl/Traduction en créole haïtien

Franns Goudè/Frantz Gourdet


T. 1

12 x 17 cm • 240 pages

EAN 13 9791095253129

ISBN 979-1-0952-5312-9


T. 2

12 x 17 cm • 240 pages

EAN 13 9791095253136

ISBN 979-1-0952-5313-6

Premiers émois amoureux, premiers grands cris de joie, les amis, la bicyclette rouge, l’odeur du café…

L’espace d’un été, Dany Laferrière nous prête les yeux et l’âme de son enfance. Ce récit campe la vie pleine de surprises de Petit-Goâve la nuit ou sous le soleil, face à la mer des Caraïbes.

Texte intégral en français de Dany Laferrière accompagné de sa traduction en créole haïtien


An n chita sou galeri Da, Tigwav, nan mitan seremoni lavi a, ak je Vye Zo, yon ti gason dizan. Kè nou ap bat ak kè l… Nou jwenn zanmi danfans nou, premye ti menaj la, yon chen talon kikit, kana anba lapli, kolonn pijon tou ble, lanmou, krim, djab wouj, simityè, Da ak sant kafe Palm… 

Nan chak tablo liv sa a, kout penso Dani Laferyè ban nou son, koulè, kadans ak tout savè moun anba solèy lakay.


C’est un peu après le terrible morne Tapion. Laissez rouler votre camion… et essayez de vous arrêter au 88 de la rue Lamarre. Il est fort possible que vous voyiez, assis sur la galerie, une vieille dame au visage serein et souriant à côté d’un petit garçon de dix ans. La vieille dame, c’est ma grand-mère. Il faut l’appeler Da. Da tout court. L’enfant, c’est moi. Et c’est l’été 63.

Lè w fin pase mòn Tapyon ou konnen k malouk la, kite kamyon an woule… epi gade si w a kanpe ri Lama, nimewo 88. Pinga sezi wè, sou galri devan kay la, yon dam poze, ki fin granmoun, ap souri bò kote yon ti gason dizan. Granmoun lan, se grann mwen. Se pou w rele l Da. Da, epi anyen. Timoun lan se mwen. Nou nan grann vakans 63.

Mon grand-père n’avait qu’une passion : les roses. Il en a fait planter tout autour de la maison. Il les arrosait lui-même chaque matin et chaque soir. J’allais remplir un petit seau en plastique bleu que je lui remettais. Avec ce seau, il ne pouvait arroser que trois ou quatre plants. Au début, on y allait lentement. J’adorais faire ce travail avec mon grand-père. Il était toujours gentil et me demandais sans cesse si je n’étais pas fatigué, si je ne voulais pas prendre un petit repos. Alors, je courais encore plus vite remplir le seau. J’allais de plus en plus vite. Mon cœur cognait fort.

L’autre passion de mon grand-père, ce sont les tracteurs. Du temps de la grande richesse, il avait commandé un tracteur à Chicago. Le temps que la commande arrive, le prix du café avait chuté au plus bas sur le cours mondial. Mon grand-père et Petit-Goâve avaient fait faillite, avaient tout perdu. Par bonheur, les gens de Chicago ont continué à lui envoyer leur catalogue mensuel.

Je ne sais pas si c’est parce que j’ai de la fièvre, mais je n’arrête pas de penser à la mort.

— Pourquoi on meurt, Da ?

— Pourquoi on dort ?

— Pour se reposer.

— Alors ?

— Alors quoi, Da ?

— La mort, c’est le sommeil éternel.



Da - L'odeur du café (Récit) • À paraître fin 2016